4566730_7_7c21_700-auteurs-africains-font-partie-du-catalogue_949abd49fdbef925f2d72c182e8d87b9Rue des Écoles, en plein cœur du Quartier latin à Paris, une adresse qui ne paie pas de mine et dont l’enseigne évoque un vent sec et chaud d’Afrique de l’Ouest. L’intérieur a toutes les allures d’une vieille bibliothèque : des ouvrages à la couverture un peu jaunie, de gros cartons qui traînent sur un coin de la moquette, des affiches de grandes figures des indépendances africaines collées sur les murs, une troublante odeur de poussière et une faible luminosité. Telle est la librairie des éditions L’Harmattan.

Entre les rayons surchargés de livres, une jeune femme derrière un ordinateur vous tend, presque en guise de salutations, un exemplaire du « contrat d’édition » avant de vous demander si « vous venez pour un manuscrit ? »Cet accueil étrange est un réflexe. Depuis ses débuts en 1975, quand la maison d’édition a été fondée pour accompagner les mouvements tiers-mondistes et de lutte contre le « néocolonialisme », L’Harmattan est devenu le passage obligé de tout Africain désireux d’être publié en France.

Chiffre d’affaires insolent

Pour la première quinzaine de janvier 2015, l’éditeur propose 123 ouvrages Afrique et Maghreb, sur 274 en tout. La fournée comprend des romans et des recueils de poésie comme « À côté du soleil » du Sénégalais Makhtar Diop ou « Les amants de Lerbou » du Burkinabè Baba Hama, mais aussi des thèses et des actes de colloque ou encore des manuels de théologie comme « Fonctions et défis du pasteur dans l’Afrique contemporaine » de Jimi Zacka.

Environ 700 auteurs africains font partie d’un catalogue qui compte près de 40 000 titres. Une véritable prouesse qui le positionne comme l’un des éditeurs français les plus importants en nombre d’ouvrages, devant des monstres comme Gallimard ou Le Seuil.

Son chiffre d’affaires est tout aussi insolent dans un secteur pourtant en crise : 8,5 millions d’euros en 2014 et des exercices à chaque fois bénéficiaires. De quoi faire rêver ! La ligne défendue par Denis Bernard Désiré Pryen, le fondateur, est de faire connaître les cultures du Sud. « Chacun a le droit d’être publié, dès lors qu’il pense avoir quelque chose à dire, et davantage encore les auteurs des pays africains qui ont difficilement voix au chapitre », soutient celui qui a dirigé la structure pendant trente-cinq ans avant de céder la place à son neveu Xavier Pryen. Aujourd’hui à la retraite, Denis Pryen a conservé un bureau à la rue des Écoles et continue d’avoir l’œil sur tout.