mariam-sankaraL’enquête sur l’assassinat du père de la révolution burkinabè, Thomas Sankara, vient de connaître une évolution. En effet, son épouse Mariam Sankara a été pour la première fois auditionnée par le juge d’instruction le 18 mai 2015. Cette audition qui aura duré huit heures, a permis à celle qui a souffert le martyre pendant 27 ans, de confirmer sa plainte devant le juge et de pouvoir se libérer d’une partie du lourd fardeau moral qu’elle portait. L’affaire Sankara cristallise l’attention des Burkinabè depuis plus d’un demi siècle et la nouvelle tournure qu’elle vient de prendre ne peut que soulager plus d’une personne. Certes, l’audition de Mariam Sankara n’est certainement que le début d’un long feuilleton politico-judiciaire, car un tel assassinat ne saurait être élucidé en un laps de temps. Surtout que de nombreuses  personnes politico-militaires sont impliquées dans cet assassinat. Mais comme le dit l’adage, le plus long voyage commence toujours par un pas. C’est pourquoi il faut souhaiter que cette affaire qui a pris son envol suive sereinement son cours afin que la vérité tant attendue jaillisse, au grand bonheur des ayant droits de Thomas Sankara et de tous les hommes épris de justice.  Sans nul doute que si la justice cherche à entendre les ayant droits, c’est qu’elle est aussi disposée à écouter ceux qui sont présumés avoir envoyé ad patres le 15 octobre 1987, celui qui aura marqué l’histoire politique du Burkina, voire de l’Afrique au cours de la décennie 80. Et le travail de la justice pourrait, au regard de certains faits, être facilité. D’abord, il y a des témoins oculaires de la boucherie du 15 octobre qui sont encore en vie. Mieux, il y a des personnes qui ont affirmé haut et fort avoir tiré sur le capitaine Thomas Sankara le 15 octobre 1987 et qui sont toujours en vie. Outre ces personnes, il y a des propos contradictoires que certains bénéficiaires du coup d’Etat ont tenus aux premières heures de l’assassinat du guide de la révolution. Il est évident qu’une éventuelle exploitation judicieuse de toutes ces mines d’informations pourrait conduire à la manifestation de la vérité. Il est absolument nécessaire que chacun des exécutants et commanditaires de ce crime  réponde de ses actes. Car rendre justice à l’orphelin et à la veuve, c’est rendre justice à Dieu.

Si le régime de Blaise Compaoré était toujours en place, le dossier n’allait jamais bouger d’un iota

D’ailleurs, on pourrait dire que l’environnement actuel est favorable à la manifestation de toutes les vérités. En effet, parmi ceux qui sont aujourd’hui aux affaires, peu se reprochent quelque chose en tout cas, par rapport à  l’assassinat du feu président Thomas Sankara.  C’est pourquoi d’ailleurs l’affaire est actuellement en instruction. C’est une lapalissade de dire que si le régime de Blaise Compaoré était toujours en place, ce dossier n’allait jamais bouger d’un iota. S’il y a eu cette fenêtre aujourd’hui, c’est parce que la justice donne des gages d’une certaine indépendance. Et c’est à l’honneur des autorités de la transition qui, dès leur prise de fonction, n’ont pas fait mystère de leur volonté de rendre justice à la famille Sankara. Il faut du reste, souhaiter que les autorités qui viendront après elles, s’inscrivent dans cette dynamique afin de mettre fin à l’impunité. C’est seulement à ce prix que l’on pourra réhabiliter les différents martyrs et apaiser les cœurs meurtris de milliers de Burkinabè dont les proches ont été victimes du rouleau compresseur du régime de Blaise Compaoré. En tout état de cause, cette audition de Mariam Sankara qui ne manquera pas de troubler le sommeil de certains, est un ouf de soulagement pour tous ceux qui luttent depuis des années pour que justice soit rendue à la famille Sankara. Enfin, on est sur le chemin de la vérité, serait-on tenté de dire ? En tout cas, c’est bon pour le moral.

Actuburkina