nkurunzizaRéélu avec 69 % des voix, Pierre Nkurunziza fait grincer des dents. Cette large victoire est contestée par l’opposition, qui juge anti-constitutionnel un troisième mandat du président sortant.

Les mouvements de contestation provoqués par l’annonce de sa candidature s’étaient soldés par plus de 80 morts, et une partie de l’armée avait tenté de le déloger à la mi-mai au moyen d’un coup d’Etat, en vain.

L’issue du scrutin ne faisait aucun doute. Le président sortant du Burundi Pierre Nkurunziza a été proclamé vainqueur de l’élection présidentielle aujourd’hui par la commission électorale nationale indépendante (Céni). En recueillant 69,41 % des voix, Pierre Nkurunziza est réélu pour un troisième mandat consécutif très controvorsé, et jugé contraire à la Constitution par ses adversaires. L’opposition n’avait pas pu faire campagne et plusieurs candidats s’étaient désistés. Le scrutin, qui s’est tenu lundi, a d’ailleurs été boycotté par l’opposition et de nombreuses violences ont eu lieu la veille et le jour de l’élection.

La participation s’est élevée à 73,44%, selon la Céni, alors qu’observateurs et journalistes avaient constaté une affluence relativement moyenne dans les bureaux de vote. Le chef de l’Etat l’emporte dans 16 des 18 provinces du pays, notamment à Bujumbura, qui lui est traditionnellement hostile mais où votaient de nombreux militaires et policiers déployés dans la capitale le jour du vote. Principal opposant, Agathon Rwasa, qui représentait la coalition d’opposition, arrive en deuxième position avec 18,99% des suffrages. Les six autres candidats ont recueilli de très faibles scores. En avril, l’annonce de la candidature de Pierre Nkurunziza à un troisième mandat a plongé le pays dans la plus grave crise politique qu’il ait connu depuis dix ans.

Un mandat jugé anti-constitutionnel

Depuis l’annonce de la candidature de Pierre Nkurunziza, manifestations et violences ont fait plus de 80 morts. En mai, un coup d’Etat raté a tenté de déloger Pierre Nkurunziza de son fauteuil présidentiel. Les Etats d’Afrique de l’Est, sous l’égide du président ougandais Yoweri Museveni, ont amorçé des négociations en juillet et tenté de repousser les élections maintes fois pour enrayer cette crise politique et mettre fin aux violences quotidiennes, en vain. Pierre Nkurunziza a montré sa volonté de s’accrocher au pouvoir. Les autorités burundaises ont maté toute contestation de la société civile avec violence, au point de faire taire les voix dissonantes depuis juin, jusqu’à la veille du scrutin. Près de 160 000 Burundais ont fui dans les pays voisins. La communauté internationale estimait que le climat d’intimidation et de violences politiques, ainsi que l’absence de médias privés au Burundi, ne permettait pas des élections crédibles.

Déjà élu en 2005 et réélu en 2010, Pierre Nkurunziza débute ici son troisième mandat. L’oppositon politique et la société civile jugent ce dernier anti-constitutionnel. En effet, l’article 96 de la Constitution burundaise limite l’exercice du pouvoir exécutif à dix ans: «Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois.» Pierre Nkurunziza ne fait pas figure d’exception dans le paysage politique africain. Déjà, plusieurs dirigeants ont manifesté leur volonté de conserver le pouvoir malgré les dispositions légales censées les en empêcher.

LeFigaro