dadis_camara (2)L’ex-chef de la junte guinéenne, Moussa Dadis Camara, a été inculpé le 9 juillet pour complicité d’assassinats, séquestration et viols, lors du massacre du 28 septembre 2009. Son procès ne se tiendra certainement pas avant la présidentielle prévue en octobre, à laquelle il s’est déjà porté candidat, et jusqu’au verdict, il sera considéré comme innocent.

Pour la première fois depuis l’annonce de son inculpation, Moussa Dadis Camara s’exprime dans les médias. Il a répondu aux questions de Jeune Afrique par écrit, depuis Ouagadougou où il se trouve en exil.

Jeune Afrique : Avez-vous été surpris par cette inculpation ?

Moussa Dadis Camara : Non. De toute évidence, on ne peut pas chercher à rendre la justice sur un événement aussi grave sans inculper toute la chaîne de commandement. Je ne suis donc pas surpris ni par ces chefs d’accusations de complicité, ni par le timing de cette inculpation, puisque l’on est à quelques mois des élections [la présidentielle doit avoir lieu le 11 octobre, ndlr].

Comment s’est déroulée votre audition, le 7 juillet ? Dans quel état d’esprit étiez-vous ?

J’étais et je reste serein et confiant. J’ai moi-même réclamé que justice soit faite bien avant l’attentat sur ma personne, qui est directement lié à la journée du 28 septembre [le 3 décembre 2009, Toumba Diakité, son aide de camp et chef de « Bérets rouges », accusés d’être responsables des massacres, a ouvert le feu sur Dadis Camara]. Je sais que le président Alpha Condé mettra un point d’honneur à ce que justice soit rendue de manière transparente et sans détours.

Comptez-vous toujours, comme vous l’avez plusieurs fois annoncé, rentrer prochainement en Guinée ?

Oui. La Guinée est synonyme de justice. Comment pourrais-je avoir l’estime du peuple si je ne rentre pas dans mon pays ? Les élections approchent, la justice avance, et je me dois de me battre et de montrer à mes détracteurs et à mes ennemis que je suis et que je resterai avec la Guinée.

Cette inculpation met-elle un terme à vos ambitions pour la présidentielle d’octobre ?

Non, bien au contraire. Depuis mon exil forcé, j’attends que la lumière soit faite sur ces événements. Je ne suis pas impliqué dans ce massacre et j’attends que la justice conforte ma légitimité à me battre pour la Guinée dans des élections démocratiques.

Que va devenir votre alliance avec l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) de Cellou Dalein Diallo ?

La vraie question est : pourquoi cette décision de justice tombe-t-elle alors que nous discutons d’un projet d’alliance forte et juste ? Je crains une orchestration, voir une instrumentalisation politique de la justice. Je n’ai jamais redouté aucune décision de justice, mais force est de constater qu’il y a probablement un désir de restreindre notre élan. Donc je vous retourne la question : à qui profiterait mon absence et l’anéantissement de cette alliance ?

Qu’attendez-vous du procès qui se profile ?

Comme vous : des réponses. N’oubliez pas que j’ai failli perdre la vie après ces événements. Punir ces éléments factieux revêt un caractère presque personnel, même si mes pensées vont d’abord aux Guinéens qui ont soufferts ce jour-là. Un procès apportera la vérité et les vrais coupables seront condamnés. Et peut-être qu’il attirera l’attention sur ceux à qui profite mon éloignement. Souvenez-vous qu’ « il n’y a point de plus cruelle tyrannie que celle que l’on exerce à l’ombre des lois et avec les couleurs de la justice » [citation de Montesquieu].

 

  Par Jeuneafrique