Pierre-NkurunzizaLe président burundais Pierre Nkurunziza a nommé mardi par décret le premier gouvernement de son 3e mandat controversé, largement composée de fidèles et dominé par des « durs ».

La nouvelle équipe est largement renouvelée et le nouveau gouvernement nommé par décret aujourd’hui est surtout marqué par le retour d’Alain-Guillaume Bunyoni au ministère de la Sécurité publique. L’homme qui joue un rôle clé au sein du système sécuritaire du régime est considéré comme un « dur » au sein même du cercle restreint des proches de Nkurunziza.

Des militaires nommés

Ancien chef militaire au sein de la rébellion hutue CNDD-FDD, le parti au pouvoir, le commissaire de police Bunyoni a été le premier directeur de la nouvelle police burundaise au lendemain de la guerre civile, de 2005 à 2007 et a déjà été à la tête du ministère de la Sécurité publique entre 2007 et 2011, avant de devenir chef de cabinet civil du président jusqu’en novembre 2014. Perçu à un moment comme le potentiel dauphin du président Nkurunziza, Alain-Guillaume Bunyoni est considéré comme l’un des deux hommes les plus influents du régime, au côté du général Adolphe Nshimirimana, ancien chef des services de renseignement, assassiné le 2 août à Bujumbura.

Il remplace à la Sécurité publique Gilbert Nizigama, également commissaire de police. Ce dernier devient alors directeur de cabinet civil adjoint du président, au côté du militaire, le général Évariste Ndayishimiye, ex-ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique entre 2006 et 2007.

Le retour de l’aile dure

« Ce gouvernement n’est pas rassurant […] remettre Bunyoni à la Sécurité publique et nommer deux autres généraux chef et chef adjoint du cabinet civil présidentiel, cela signifie que c’est la ligne dure et le passage en force qui ont prévalu », commente un diplomate occidental, qui souhaite rester anonyme à Bujumbura.

« On avait compris que ce gouvernement était nommé pour préparer le terrain à un gouvernement d’union nationale […] mais c’est clairement l’aile dure du parti au pouvoir qui a pris le dessus. À nos yeux, c’est un gouvernement qui ne va pas faciliter l’apaisement et le dialogue » malgré « la présence de ministres issus » des rangs d’Agathon Rwasa, a-t-il souligné.

Cinq ministères pour les partisans d’Agathon Rwasa

Les partisans d’Agathon Rwasa, principal opposant au président Nkurunziza, devenu premier vice-président de l’Assemblée après avoir accepté de « jouer le jeu » des institutions en y siégeant avec ses troupes, récupèrent cinq ministères d’importance secondaire (Bonne gouvernance, Fonction publique, Développement communal, Transports et Travaux publics, Jeunesse et Sports).

Pascal Barandagiye, ministre de la Justice depuis 2011 hérite quant à lui de l’Intérieur, à la place d’Édouard Nduwimana, élu second vice-président de l’Assemblée nationale. Le remplace à la Justice, Aimée-Laurentine Kanyana, jusqu’ici magistrate à la Cour constitutionnelle qui a autorisé Pierre Nkurunziza à briguer un 3ème mandat.

Outre cet unique changement de portefeuille, seuls cinq ministres conservent leurs postes alors que le reste de l’équipe est renouvelée. Alain-Aimé Nyamitwe garde les Affaires étrangères, Léontine Nzeyimana reste ministre à la présidence chargée des Affaires de la Communauté est-africaine (EAC), Tabu Abdallah Manirakiza est maintenu aux Finances et au Budget et Côme Manirakiza à l’Énergie et aux mines. Quatre portefeuilles-clés qui restent à des fidèles.

Emmanuel Ntahomvukiye conserve quant à lui le portefeuille de la Défense, mais son statut de civil pourrait le desservir et laisse penser qu’il a peu de prise sur l’armée.