charle kaboréRévision de la Constitution, dissolution de la garde présidentielle: Roch Marc Christian Kaboré, souvent présenté comme l’un des favoris à la présidentielle du 11 octobre au Burkina Faso, veut une « rupture » avec l’ancien régime de Blaise Compaoré.

« Notre parti », le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), « prêt » pour le scrutin, a « comme objectif de satisfaire les demandes des Bukinabè », a déclaré à l’AFP M. Kaboré, de passage à Paris.

Un an après la chute de Blaise Compaoré, chassé par la rue après 27 ans de pouvoir, le Burkina Faso organise le 11 octobre une présidentielle couplée à des législatives, premières élections véritablement « ouvertes » de l’histoire du pays, selon M. Kaboré.

Ancien baron du régime déchu, plusieurs fois ministre, ex-président de l’Assemblée nationale (2002-2012), M. Kaboré avait d’abord été à l’origine d’un projet de révision constitutionnelle autorisant le maintien au pouvoir de l’ex-président, avant de tomber en disgrâce en 2012. Il avait ensuite mené la fronde en 2014 contre cette même tentative de révision constitutionnelle, qui finalement précipitera la chute de M. Compaoré.

« J’aurai un exercice du pouvoir différent », assure-t-il aujourd’hui, « en phase avec la social-démocratie » et « dans le sens de l’intérêt général ». « Je travaillerai à la bonne gouvernance, l’intégrité, à lutter contre la corruption et l’impunité ».

« C’est précisément cette impunité qui a fini par emporter le système Compaoré », souligne M. Kaboré.

« L’insurrection d’octobre a donné une conscience au peuple (…). Le système CDP (Congrès pour la démocratie et le progrès, ex-parti présidentiel) touche à sa fin. Les bases de ce parti sont largement ébranlées, nous n’avons aucune crainte » sur son éventuel retour dans le jeu politique.

Seize candidats ont été retenus pour la présidentielle par le Conseil constitutionnel, mais le candidat du CDP a été rejeté, ainsi que celui d’un parti allié, en vertu d’une loi visant ceux qui ont soutenu l’ancien président dans son projet de modifier la Constitution.

« Le CDP ne peut s’en prendre qu’à lui-même », a commenté M. Kaboré. « Il leur appartenait de désigner des candidats qui n’auraient pas été sanctionnés par la loi ».

Quant à faire participer des personnalités CDP à la gestion du pays, « nous sommes ouverts, mais je souhaite être d’abord accompagné par les partis qui ont participé à l’insurrection populaire d’octobre 2014 », a souligné le candidat du MPP.

– Vers une armée « apolitique » –

Sur Blaise Compaoré lui-même, accusé de « haute trahison » et « attentat à la Constitution » par la justice de son pays, il « appartient à cette même justice » de statuer sur son sort, selon M. Kaboré, qui affirme qu’il « n’y mettra aucun blocage ».

« Je n’ai pas les preuves qu’il (l’ex-président) tire les ficelles » depuis son exil en Côte d’Ivoire, « mais ce serait une erreur s’il continuait à le faire, ce serait dangereux », a-t-il averti.

M. Kaboré a réaffirmé sa volonté de réviser l’actuelle Constitution, pointant des « insuffisances », et de « marquer la rupture avec l’actuelle IVe République ». « Nous devons travailler à réduire le pouvoir présidentiel », a-t-il justifié, promettant de s’y atteler « dès les premiers mois » au pouvoir, même si les modifications à faire ne sont pas « arrêtées définitivement ».

« Si je suis élu, l’armée sera républicaine et apolitique », a-t-il promis, alors que la garde présidentielle (RSP), régiment d’élite et bras armé de l’ancien régime, dont est issu l’actuel Premier ministre de la transition Isaac Zida, suscite des inquiétudes. « Je procéderai à une réorganisation (…) Tous les régiments spécialisés feront partie de l’armée régulière », ce qui signifie « forcément » la dissolution du RSP.

Sur le plan diplomatique, « les relations avec la Côte d’Ivoire voisine sont excellentes, et elles le resteront ». Partenaire incontournable dans la gestion des crises en Afrique, plus particulièrement au Sahel, « le Burkina poursuivra sa coopération régionale et internationale, on n’a pas le choix ».

« Confiant », M. Kaboré dit vouloir faire en sorte « que tous les Burkinabè partagent les fruits de la croissance », en relançant « l’agriculture sylvo-pastorale, l’emploi des jeunes », développant les « petites et moyennes entreprises » et faisant « du secteur minier un levier de la croissance ». Il s’est par ailleurs engagé à nommer 30% de femmes au gouvernement.