bandits CeniDans la nuit du 17 au 18 novembre 2015, quatre bandits armés de kalachnikovs et  de pistolets sautent par-dessus le mur du domicile d’un membre de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), il est environ 20h dans ce nouveau quartier de la haute banlieue appelé Samatran.

Les bandits commencent leur opération en maîtrisant un jeune homme de la famille qui prend de l’air dehors. Ils l’enferment dans une annexe qui sert de boutique. Pendant que l’un des malfrats assure l’arrière-garde de ses camarades en arpentant la cour, les trois autres entrent dans la maison et mettent au respect les enfants rassemblés autour de la télé. Ils pillent chambre par chambre, armoire par armoire, et raflent tout ce, dont ils ont besoin : téléphones, bijoux, tablettes, ordinateurs et argent. Le père et la mère des enfants sont allés à Dabompa pour présenter leurs condoléances suite au décès d’un parent. Le Commissaire laisse sa femme à la maison mortuaire, rentre avec le chauffeur qui descend en route pour rentrer chez-lui, il est 21h 35. Il ne se doute de rien, gare au portail et klaxonne trois fois, c’est un bandit qui ouvre, le met en joue et le dépouille de ses papiers, de son argent de poche puis le conduit dans sa chambre où il lui intime de sortir tout l’argent de la maison. L’hôte répond qu’il ne lui reste plus rien, vu que toutes les armoires de toutes les chambres ont été systématiquement fouillées. La crapule menace : «  Nous allons continuer à fouiller, si nous trouvons encore de l’argent, nous te tuons parce que tu nous auras menti ». Ce à quoi répond le Commissaire : « Tuez-moi si je mens ».

Estimant qu’il n’y a plus rien à prendre, les bandits prennent soin d’enfermer leur hôte dans le local, avant de se retirer avec leur butin. Un téléphone a échappé à leur vigilance, celui que le Commissaire avait glissé sous l’un des sièges de la cabine, avant de descendre du véhicule, c’est ce téléphone qui permet à la famille de  lancer les premiers appels. La brigade de gendarmerie du quartier alertée dit qu’elle est occupée chez un citoyen qui vient d’être braqué par un gang qui est parti avec sa voiture ; les gendarmes arrivent après 23h, constatent les dégâts puis se retirent en laissant leurs contacts.

Beaucoup de parents, amis et collaborateurs sont informés la nuit. Ils accourent toute la journée du lendemain pour s’enquérir des faits et compatir au malheur de la famille. Tout le monde s’exclame : « Dieu merci les malfrats n’ont pas fait couler du sang, ils ont emporté seulement de l’argent et du bien matériel ». Le Commissaire et les autres membres de la maisonnée sont harcelés de questions par les visiteurs. Du genre : « les bandits étaient au nombre de combien ? Ils étaient quatre, répond le Commissaire. Etaient-ils cagoulés ? Non, ils ont opéré à visage découvert, mais dès que vous fixiez un, il vous braquait son arme, répond-t-il. Ou étaient-ils véhiculés ? Non, ils sont venus à pied… Avez-vous un vigile armé qui garde la maison ? Non, nous avons deux chiens de garde qu’on libère la nuit avant de nous coucher, mais à l’arrivée des bandits hier ils étaient encore enfermés dans leur enclos. »

Voici le récit d’un drame qu’on vit presque au quotidien à Conakry depuis des années. Une ville où la multitude des pauvres n’arrête pas de se demander quand son sort va-t-il changer. Où les riches se couchent la peur au ventre, se demandant comment préserver leurs biens et leur vie ? Le gouvernement a certainement du pain sur la planche pour satisfaire les uns et les autres. Les investisseurs, eux, nationaux ou étrangers, gardent leurs sous en attendant de voir réunis les préalables de tout développement, préalables que sont une électricité propre et permanente, une justice équitable, une sécurité assurée pour tous.

O.TIERO/L’Indépendant