L’Afrique doit actionner trois leviers fondamentaux qui peuvent permettre d’atteindre des stades de réels développements : la valorisation des ressources humaines en véritable capital humain, l’industrialisation moderne et productive, dont la valorisation des ressources naturelles en produits industriels, la valorisation de certaines ces ressources naturelles en énergie, et notamment électrique.

Un défi majeur

Parmi ces leviers, celui du développement énergétique est le socle, la base, la pierre angulaire des deux autres leviers de la croissance économique, du développement humain, de la paix et cohésion sociale. C’est donc le défi majeur de l’Afrique, du moins des pays africains qui présentent encore des déficits en infrastructures électriques et dont plus de la moitié des populations n’ont pas encore accès à l’électricité. Tout le monde le sait et les slogans en la matière deviennent répétitifs et ennuyeux, face à l’urgence. Afin de répondre à la demande d’énergie et d’électricité des États africains, plusieurs questions se posent et qui méritent d’être développées : quelle est la cartographie des problématiques et des enjeux énergétiques actuellement en Afrique ? Les États africains doivent-ils investir massivement dans la transition énergétique et la production d’énergies renouvelables ? Quelles sont les stratégies à développer, les types et modèles de financement à mettre en place ?

Problématiques et enjeux énergétiques

L’insuffisance de disponibilité constante de production et d’infrastructures électriques en Afrique fait perdre au continent 3 à 4 points de croissance du PIB annuel, freine la véritable réalisation des potentiels de croissance sociale et de développement humain. L’Afrique représente 15 % de la population mondiale, mais ne représente que 3,2 % de la consommation en énergie primaire. Le taux moyen d’électrification n’est que de 42,9 % pour toute l’Afrique, seulement 32 % pour l’Afrique subsaharienne avec des pénuries et délestages assez constants ! Le secteur de l’électricité étant très capitalistique, il faut investir au minimum 400 milliards de dollars d’ici 2030 afin d’avoir de l’électricité de manière suffisante et constante en Afrique. La puissance à installer est de l’ordre de 30 000 000 de MW d’ici 2025. Le décollage pérenne de l’Afrique, sa véritable industrialisation, son développement agricole et rural ne se feront qu’avec des solutions innovantes de production énergétique, permettant un accès plus large et une meilleure disponibilité de l’électricité, pour le tissu économique et les populations, de manière durable. La pire des difficultés consiste à vouloir distribuer de l’électricité à une population qui ne peut pas la payer. Cette contrainte est si prégnante que les bailleurs de fonds tiennent rarement leurs promesses, faute de rentabilité immédiate. Les entreprises privées sollicitées préfèrent la reprise d’installations existantes à la construction d’ouvrages neufs. Elles se désengagent souvent à cause du coût prohibitif de la réhabilitation d’équipements obsolètes et de l’impossibilité de vendre la production à son vrai prix.

Promesses d’investissements pas toujours tenues

L’Afrique est exportatrice nette d’énergie représentant environ 9,5 % de la production énergétique mondiale, mais elle ne consomme qu’environ 3,2 % de cette production. La capacité de production des 48 pays au sud du Sahara est de 68 gigawatts, presque deux fois inférieure à celle de la France. Hors Afrique du Sud, la consommation d’électricité en Afrique subsaharienne représente à peine 1 % de celle des pays à revenu élevé. L’Afrique subsaharienne produit 82,9 térawatt heures d’électricité hydraulique, soit seulement 2,6 % de la production mondiale, mais elle n’exploite que 3 % de son potentiel hydroélectrique. Elle tient une place insignifiante dans la production à partir des autres sources d’énergies renouvelables. Si tous les barrages du complexe de « Grand Inga » étaient construits, ce site exceptionnel pourrait produire 44 gigawatts, capables de couvrir 40 % des besoins de l’Afrique ! Quant aux installations actuelles, elles sont censées générer 1 800 mégawatts, mais plusieurs groupes sont à l’arrêt.

La situation empire, à la suite de la baisse du débit du fleuve Congo et au manque d’entretien : le barrage hydroélectrique d’Inga qui produit habituellement 800 mégawatts n’en fournit actuellement que 300 à l’heure où la ville de Kinshasa, à elle seule, a besoin de 650 mégawatts pour ses besoins énergétiques, domestiques comme industriels. Les installations d’Inga tournent donc à moins de 20 % de leur capacité et ne parviennent plus à satisfaire la demande de Kinshasa. Il est donc impératif de trouver d’autres modèles et innovations technologiques.

D’ailleurs, se pose aussi la question de savoir si en matière de développement durable, les barrages hydrauliques sont écologiques ? Puisque dans plus de la moitié de ces barrages dans le monde entier, le détournement des eaux entraîne des problèmes d’approvisionnement de cette source pour les populations environnantes et déconfiture la nature, voire la biodiversité.

Alpha Ahmed Expert en Energie