751751-heart-sous-fond-noirjpgSelon nos informations, un patient a été opéré à Paris et s’est vu implanter un cœur artificiel Carmat, une entreprise qui verrouille sa communication.

Et de trois. En toute discrétion, il y a près de deux semaines, un troisième patient a reçu le cœur artificiel dit Carmat. L’opération s’est déroulée à l’hôpital européen Georges-Pompidou à Paris, autour du professeur Christian Latrémouille. Et comme toujours depuis le début de cette grande aventure médicale et chirurgicale, c’est un black-out total et une opacité complète qui prévalent. Rien ne filtre. Aucune confirmation, ni de l’entreprise Carmat à l’origine de cette prothèse révolutionnaire, ni du professeur Alain Carpentier, son concepteur, ni de l’hôpital, ni de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Mais selon nos informations cette greffe à bien eu lieu. L’intervention s’est bien passée, mais les suites opératoires sont délicates.

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«Revivre». De fait, cette troisième intervention était attendue, mais elle a manifestement beaucoup tardé. La précédente ayant eu lieu, au CHU de Nantes, en août. «C’est très difficile de trouver des patients qui peuvent participer à cette recherche, car nous sommes toujours au stade de la recherche avec de fortes contraintes»,reconnaît un des chirurgiens impliqué dans ce protocole.

Le cœur artificiel Carmat est une merveille technologique, mais il est un peu lourd, imposant. Aujourd’hui, en dépit d’une miniaturisation à l’extrême, seuls des hommes de forte corpulence peuvent en bénéficier. De plus, le protocole clinique de recherche est strict : le patient n’a pas la possibilité de recevoir une greffe classique de cœur, et il doit souffrir d’une maladie cardiaque, mettant en cause sa vie à court terme.

La première greffe avait eu lieu le 18 décembre 2013 à l’hôpital Pompidou : trois mois plus tard, l’homme, âgé de 76 ans, était décédé. Le deuxième patient, opéré il y a huit mois, est lui toujours en vie. Mais, là encore, toutes les informations sont strictement contrôlées par l’entreprise Carmat et le professeur Alain Carpentier. Les chirurgiens ayant opéré, comme l’hôpital, sont tenus à une confidentialité totale. Pour justifier ce silence, l’entreprise Carmat, cotée en Bourse, met en avant des exigences juridiques et son impossibilité de «communiquer» des informations qui pourraient avoir des conséquences sur le cours de l’action.

Au début du mois d’avril, le patient nantais, s’était confié au Journal du dimanche dans une communication parfaitement maîtrisée et sans le moindre grain de sable. «Pratiquement dès le jour où j’ai été opéré, je me suis senti revivre. C’était assez formidable, car j’ai senti tout de suite une clarté de réflexion plus nette. Tout reprenait vie», avait ainsi confié cet homme de 69 ans. Opéré le 5 août, il est rentré chez lui le 2 janvier. «Je marche, je me lève et je me penche dix à quinze fois chaque jour, sans problème. Je garde mon équilibre. Je ne suis pas dérangé. Je n’y pense même pas», a-t-il raconté. «Quasiment depuis le début, je n’ai pas l’impression de porter quelque chose d’étranger. Ce cœur, c’est moi. Il est devenu moi. Mais il ne faut pas oublier de charger les batteries», ironisait-il. Sur le même registre très positif, le professeur Daniel Duveau, le chirurgien qui avait réalisé l’opération au CHU de Nantes, précisait que le patient pratiquait même le vélo depuis son retour chez lui.

«Pas saine». Bref, un quasi-miracle. Et c’est bien là que l’histoire du cœur Carmat s’embrouille. Cette aventure chirurgicale est inédite et complexe, ce qui est dans l’ordre des choses. Mais leurs auteurs ont décidé de tout contrôler, quitte à faire quelques entailles à la vérité. Ainsi, il ne semble pas que l’histoire de Nantes se déroule de façon aussi parfaite que cela. Selon nos informations, l’opéré de Nantes a dû être réhospitalisé. Mais, là encore, rien ne filtre. Pour le premier patient, décédé après soixante-quatorze jours, Carmat comme le professeur Alain Carpentier ont sur le moment répété que tout allait bien, et que le patient avait une convalescence sans souci. Ce qui a été démenti par les proches, après son décès.

«On est dans une situation de non-communication qui n’est pas saine»,réagit un chirurgien cardiaque, pourtant très admiratif du talent inventif du professeur Alain Carpentier. «Il y a de tels enjeux financiers que le discours public reste truffé d’omissions. On ne respecte plus une élémentaire vérité médicale.» En l’état, il faudra attendre le bon vouloir de l’entreprise Carmat pour avoir des nouvelles du troisième opéré.