Pour commencer et si vous nous parliez de votre parcours en tant qu’animatrice culturelle ?
Mme Aya Aïssata Diawara: Un parcours normal. Je suis d’abord sortante de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry. Ensuite, fruit «enfant » de la télévision guinéenne. J’ai passé tout mon parcours après l’université à télévision. Je suis un fruit de la RTG. J’ai fait le journalisme à la faculté des sciences humaines. J’ai ma maîtrise en journalisme avec mention excellent.
Parlons de votre émission «parade», qui est si populaire aux yeux du public. Comment se font les préparatifs de l’émission avec votre équipe?
Je ne suis qu’une simple présentatrice de l’émission, généralement le travail se fait par l’équipe. Avec un réalisateur, les techniciens, les invités, les appels. A trois mois le programme est déjà disponible. Etant l’animatrice de l’une des émissions les plus suivies, on aide les artistes à y faire leur promotion et surtout leurs sorties d’albums. On essaie de recevoir certaines personnes qui ont des communications à faire un ou deux passages dans le mois. Il y avait un handicap dans la production à l’époque les animateurs surtout à la télévision étaient les seuls à tout faire. Donc très exténués avant l’heure du tournage. Maintenant et fort heureusement c’est l’équipe qui fait tout, là je me prépare deux ou trois heures avant: chez l’esthéticienne, le styliste et l’entretien coulisses avec les invités. Faire plaisir aux téléspectateurs, c’est ça notre mission.
Parallèlement à l’animation culturelle, que fait Aya comme autre activité?
Je m’occupe de la section culturelle et aussi de la communication de certains particuliers. Généralement, la plupart de mon temps est consacré à la RTG et aux services des Guinéens ou qu’ils soient dans le monde.
Parlons un peu du showbiz. En tant que journaliste de formation et journaliste culturelle comme spécialité, quel regard portez-vous sur l’évolution du monde musical en Guinée, surtout celui de ces dernières années?
Pour le monde du showbiz guinéen, il y a une évolution mais très éphémère. Aujourd’hui un artiste qui sort un album est pressé de faire la promotion. On parle de lui pendant un, deux ou trois mois et il est dans les oubliettes parce qu’il y a d’autres qui attendent. Plusieurs artistes sortent en même temps. Le libéralisme est un peu exagéré. Je prends exemple sur l’émission Parade. Vous avez un clip aujourd’hui, vous le diffuser pendant un mois, les téléspectateurs vous appellent pour demander d’autres nouveautés. Donc généralement ça fait un boom et après ils se lassent. Les mélomanes traitent le Bembeya Jazz de « bonne musique retro » et pour d’autres titres ils
disent « musique démodée » Allez comprendre qu’il a y un problème?
A travers ce que vous venez de dépeindre, cela dénote qu’il y a des insuffisances dans le monde de showbiz guinéen. Alors, quelles sont les difficultés que rencontrent les artistes guinéens, selon vous?
Au fur et à mesure que le temps passe, tu entends dire autoproduction. Beaucoup d’artistes font eux même l’arrangement, la production et même la promotion de leurs œuvres. Ils veulent eux-mêmes avoir la main mise sur leurs produits. Ils se défendent en parlant des arnaques et souffrance qu’ils rencontrent avec les producteurs. Les producteurs eux se défendent en fustigeant l’instabilité des artistes. Ils ont intérêt à s’entendre. L’état accompagne un artiste mais ne peut pas de nos jours l’entretenir. Il n’y a pas de structure autour des artistes. Je crois que ce sont ces difficultés qu’ils ont le plus souvent.
Dans ce cas, que faut-il pour parvenir à des solutions qui pourront aider ces artistes à s’extirper de ce merdier?
Je crois que le bât blesse un peu partout. La conjoncture, que ce soit nationale ou mondiale. Il y a des problèmes financiers. Les artistes pour un premier temps doivent être flexibles. C’est très difficile que vous ayez quelqu’un qui puisse vous aider. Donc pour un premier album, tu fermes les yeux; tu laisses le producteur faire. Tu ne peux pas tout contrôler. Même Michael Jackson s’est fait voler à travers la piraterie. On ne peut pas tout contrôler. Pour un départ, il faut que les artistes acceptent de se laisser manager. Petit à petit vous devenez une star, votre équipe d s’élargira. De nos jours, les singles et les featurings aident à la quête de renommée. Que les artistes s’attellent a cela. Et qu’ils soient subventionnés ou pas les artistes doivent pouvoir épargner un peu d’argent à leurs heures de
gloire. L’Etat peut venir en aide, Le BDGA vous rétablir dans vos droit mais le BDGA n’est pas une entreprise sociale. Aidons les artistes à gérer leurs biens quand il est temps. A prendre des assurances et surtout à investir dans des entreprises.
Revenons à vous. Quels sont les problèmes que vous rencontrez à la RTG, j’imagine que tout n’est pas rose là non plus?
A la RTG, c’est vrai que tout n’est pas rose, mais je suis un enfant gâtée de la RTG parce que je connais beaucoup le rouage; que ce soit technique et tout. Vous avez eu l’opportunité pour une fois (tournage de Kolomatin) de voir comment mon réalisateur était avec moi. On essaie de changer l’image, de faire comprendre que les techniciens ont leurs places, ils sont très importants pour nous les animateurs. Le cameraman, le réalisateur, la régie, ils sont tous là. C’est toute une équipe qui travaille. Au départ, pour ceux qui viennent de débuter ils se découragent, parce qu’il y a un problème de caméra ou montage ici et là. On a tous eu à subir la même chose, et on s’est dit que petit à petit ça va changer. Mais je suis fière quand même. Je suis un enfant chouchou de la RTG. Franchement, les techniciens sont vraiment formidables. On n’est rien sans eux.
Quels sont les rapports du ministère de la Culture avec la section culturelle de la RTG?
Il n’y a pas de lien direct. Il y a une indépendance. Chaque département a son budget et ses problèmes à gérer. Nous ne sommes pas des organisateurs, la section culturelle de la RTG n’est pas organisatrice d’évènements. Nous accompagnons et facilitons l’accès à notre média au projet culturel des particuliers et organisations. Vous avez un projet culturel et vous voulez la médiatisation, vous faites un courrier normal que vous adressez à la direction générale. La direction générale nous transmet pour avis. C’est gratuit même si il y’a souvent lenteur dans la diffusion on satisfait toujours ceux qui nous demandent.
Pour terminer, quelles sont les perspectives d’Aya Aïssata Diawara pour les années qui viennent? Peut-être directrice de la RTG. Pourquoi pas?
(Rire) Ah vous souhaitez ça pour moi! C’est gentil! On laisse le temps venir. Je ne suis pas très pressée. Je souhaite qu’au fil du temps qu’on puisse avoir le minimum dont une télé a besoin. Et le jour où la politique gouvernementale décidera qu’on doit mettre beaucoup dans la télé, je souhaite que ce jour trouve que je sois encore vivante, pour qu’on puisse mieux s’exprimer. Parce que là on évolue avec les moyens de bord. Mais le jour qu’on investira ce qu’on doit investir dans la communication, dans la télévision, dans les lumières parce que la télé c’est la lumière, les couleurs, je pense que ça va beaucoup donner. On reste optimiste et on se dit que ça va aller. En tout cas les
ambitions, vous les saurez tôt ou tard. Je prends tout mon temps, je suis très patiente.
C’en est terminé pour cet entretien à moins que vous ayez quelque chose à ajouter…
Je dis aux téléspectateurs de la RTG qu’on se bat et on continuera à se battre tant qu’on peut. Et qu’ils sachent que la RTG est pour eux, qu’ils ne mettent pas de limite. Tout est normal ici, il suffit juste de faire les choses dans les règles de l’art. Quand vous avez un événement aussi minime qu’il soit, déposez un courrier. On ne peut pas forcement donner de l’argent, mais on vous accompagnera à sortir votre image à la télévision. Que les guinéens comprennent que la RTG les appartient pas politiquement comme ils veulent mais sur tous les autres plans: Santé, sport, culture etc. Montrer la belle image de la Guinée. C’est ça notre priorité.
Propos recueillis par Oumar Daroun (Le Démocrate)