Jouir trop rapidement est un trouble répandu chez un tiers des hommes. Exercices ? Techniques ? Médicaments ? Dix questions spéciales trucs de garçons au Dr Sylvain Mimoun, directeur du Centre d’andrologie de l’hôpital Cochin à Paris.
1. L’origine de l’éjaculation précoce, c’est la pression que l’homme se met ?
Dr Sylvain Mimoun : C’est surtout le trop-plein de pression dans le corps. En fait, c’est un peu comme une Cocotte-minute qui se met à siffler. L’éjaculation vient soulager cette pression dans le sexe. Mais quand cela arrive à répétition le réflexe s’installe, s’automatise. Cela donne lieu à une sorte de blocage inversé : on est incapable de ne pas éjaculer.
2. Que se passe-t-il concrètement quand un homme éjacule très vite ?
La sensation le déborde : il n’a pas le temps de sentir monter son excitation qu’il est déjà en train d’éjaculer, avant pénétration, parfois même avant tout contact physique
3. Pour y remédier, vous préconisez préliminaires, relations sans pénétration sexuelle, positions passives (pour les hommes), mais surtout, de la pratique !
Il faut pratiquer, oui, parce que les hommes qui ont ce trouble focalisent complétement sur leur « échec » et restent bloqués sur celui-ci. Cela alimente une mauvaise spirale.
Il y a différentes méthodes possibles : rééducation du périnée (oui, ça s’éduque aussi chez l’homme, le réflexe éjaculatoire est naturel sinon) ; stop and go (NDLR : créer des arrêts, pauses, rythmes, pour ne pas être submergé avant même de partir en croisière).
Personnellement, je recommande la méthode sexo-corporelle : on s’appuie sur la respiration par le ventre pour faire baisser la pression dans le bas du ventre. Mais cela ne peut marcher si le blocage est trop installé. Auquel cas un médicament permettra de sortir de l’engrenage.
4. Quels médicaments contre l’éjaculation précoce ?
La dapoxétine (Priligy, 30 ou 60 mg) se prend à la demande, deux ou trois heures avant le rapport sexuel. Cela permet à l’homme de réapprivoiser son plaisir dans la durée et ainsi de dépasser son blocage. S’il a réussi à ce que ça se passe bien, il contrôlera mieux ce réflexe, de sorte qu’il devrait ensuite pouvoir durer sans médicaments
5. Selon une étude OpinionWay, 61% des hommes concernés estiment que cela entraîne un déclin du désir amoureux ?
De fait, comme ils ont peur d’être débordés par l’autre, ils reculent un peu devant les relations sexuelles. Ils n’aiment pas moins mais ils se disent « plus je suis à distance, moins je serai débordé ». La baisse de désir est liée à la force de cette peur et non à la faiblesse de l’amour
6. « L’autre d’abord, moi ensuite », c’est la bonne formule ?
Oui, car l’objectif est de parvenir à ce que ces messieurs soient dans la relation avec l’autre sans pour autant se détacher de leurs sensations. Il faut donc que cela soit progressif. Et comme un homme est a fortiori plus dans l’excitation lors d’un corps à corps que s’il s’occupe du plaisir de son/sa partenaire, il a plutôt intérêt à donner du plaisir à l’autre, à l’accompagner, le temps que lui s’acclimate à sa propre excitation.
7. Pas absent et pas trop dedans quoi ?
Voilà !
8. Plus globalement, vous dites que la clé d’un rapport sexuel réussi, c’est « l’égoïsme partagé », qu’entendez-vous par là ?
Il faut se concentrer sur soi, pour maîtriser son plaisir et ses sensations, et partager le plaisir avec l’autre.
9. Il y a aussi, à l’inverse, des hommes qui ont du mal à éjaculer. Comment expliquez-vous cela ?
Il y a des anciens éjaculateurs précoces qui sont devenus anéjéculateurs (impossibilité de) ou diséjaculateurs (difficulté à). Il est bon de noter que le réflexe éjaculatoire est donc reconditionnable.
Dans ce cas, le but va être d’aider l’homme à découvrir comment son éjaculation vient (ou ne vient pas). Cette fois encore, il doit se concentrer sur lui, mais pour doper son excitation et non pour la calmer.
Fantasmes, jeux, complicité ; c’est aussi l’excitation de l’autre qui va lui permettre de jouir. Cela dit, il est plus facile pour un jeune sexologue de traiter un homme qui a des éjaculations précoces que des retardées.
10. Le porno est-il en partie responsable de tout ça ?
Oui et non. Oui, car le porno va provoquer l’excitation, mais n’entraîne pas le contrôle. Et non, parce que la consommation régulière engendre un décalage avec la vie de tous les jours.
En résumé
- L’éjaculation rapide est un réflexe, NORMAL !
- Mais qui se conditionne et reconditionne, BONNE NOUVELLE !
- Le problème inverse est plus compliqué à gérer, NANANERE !
- Le temps, c’est relatif, et la qualité ne se joue pas que sur la quantité, C’EST NOTE ?
- S’occuper de l’autre ne nous fait jamais de mal, lui fait souvent du bien et empêche de passer pour un radin, et C’EST GRATUIT !