À Tianjin, de vastes opération de dépollution sont en cours après l’explosion mercredi d’un entrepôt de produits chimiques. Fait rare : les médias chinois ont vivement dénoncé le manque de transparence des autorités locales.
« Sans surprise, le manque de détails avérés a conduit à l’émergence de théories du complot », renchérissait un autre journal officiel, le « China Daily ».
Des critiques rares, alors que le régime verrouille l’information à chaque grand désastre et que la censure sur les événements de Tianjin continuait de battre son plein sur l’Internet chinois, supprimant les articles jugés alarmistes et ratissant les réseaux sociaux.
Vaste opération de nettoyage
Pour l’heure, les autorités chinoises s’efforcent, lundi 17 août, de nettoyer des centaines de tonnes de cyanure hautement toxique sur le site du port de Tianjin, où se sont produites mercredi de puissantes explosions. Les craintes de contamination sont grandes alors que le bilan du désastre s’alourdit à au moins 114 morts.
Ces efforts étaient compliqués par la présence à proximité, sur la zone portuaire, de 16 500 conteneurs de fret maritime et par les craintes que des pluies annoncées pour la soirée ne favorisent la propagation dans l’air de cyanure d’hydrogène.
L’entreprise gérant l’entrepôt incriminé, dans une aire industrielle de Tianjin, y stockait des quantités de cyanure de sodium 30 fois plus importantes qu’autorisé, ont rapporté des médias chinois. Selon les « Nouvelles de Pékin », l’entrepôt ne pouvait, selon la loi, contenir que 24 tonnes de cette substance chimique très dangereuse.
Les équipes de secours ont construit des barrages de sable et de terre encadrant une zone de 100 000 m2 autour du site des déflagrations pour éviter toute fuite de cyanure et d’autres composants polluants, a ajouté He Shusheng.
Des niveaux de cyanure 27,4 fois plus élevés
Le cyanure de sodium, qui se présente sous forme de poudre cristalline, libère sous certaines conditions du cyanure d’hydrogène, un « gaz hautement toxique asphyxiant qui agit sur la capacité de l’organisme à utiliser l’oxygène » et peut être « rapidement mortel » selon le Centre américain pour le contrôle des maladies.
Des tests effectués dans les eaux au plus près du lieu des explosions ont révélé samedi des niveaux de cyanure 27,4 fois plus élevés que la normale, selon les officiels. Et du cyanure de sodium a été détecté jusqu’à un kilomètre de là, mais pas à l’extérieur de la « zone d’isolement » délimitée par les autorités, ont-ils affirmé.
Les responsables municipaux continuaient toutefois d’assurer que l’air et l’eau dans la ville ne représentaient aucun danger, mais les habitants riverains et les familles des victimes exprimaient leur scepticisme. « Donnez un avenir propre à nos enfants », réclamaient lors d’une manifestation, lundi, des dizaines de résidents dont les appartements se trouvaient à 600 mètres du lieu des explosions.
Leurs immeubles, désormais inhabitables, ont été soufflés par les déflagrations, qui ont fait voler en éclats les vitres de fenêtres jusqu’à trois kilomètres à la ronde.
Lourd bilan humain et matériel
Le bilan de la catastrophe, actualisé lundi, s’est alourdi à 114 morts, tandis que 70 personnes étaient portées disparues -certaines pouvant néanmoins se trouver parmi la soixantaine de corps encore non identifiés, ont indiqué les autorités. Plus de 700 personnes ont été hospitalisées.
Par ailleurs, la pression s’accentuait, lundi, sur les responsables municipaux, soupçonnés de laxisme en raison du feu vert délivré à la construction de cet entrepôt de produits dangereux à moins d’un kilomètre de zones résidentielles existantes, en dépit des normes de sécurités chinoises.
Or, d’après plusieurs médias chinois – dont le site Sohu et les « Nouvelles de Pékin » -, l’entreprise propriétaire de l’entrepôt, Rui Hai International Logistics, comptait parmi ses principaux actionnaires le fils d’un ancien chef de la police de Tianjin.
Des procureurs d’État ont annoncé dimanche avoir lancé une enquête pour déterminer s’il y avait eu ou non « des abus de pouvoir ou des fautes par négligence », selon « Chine nouvelle », ce qui ouvre la voie à d’éventuelles poursuites de responsables locaux.
Avec AFP