La chambre haute du Parlement doit passer au crible à partir de demain mardi les 36 hommes et femmes de la liste proposée par le président de la première économie africaine, avant d’en confirmer les nominations. Les ministères seront alors attribués par le président « himself ».
Le président Buhari, qui a pris ses fonctions le 29 mai après avoir été élu en mars, avait soumis une première liste – partielle – de noms au parlement le 30 septembre. Depuis, la spéculation va bon train sur l’affectation que recevrait chacun.
Ibe Kachikwu, nouveau président de la Compagnie pétrolière nationale nigériane (NNPC), devrait devenir secrétaire d’Etat en charge de gérer au quotidien les affaires du secteur pétrolier. M. Buhari avait annoncé qu’il allait prendre en charge lui-même le portefeuille clé du pétrole au sein du gouvernement.
L’ancien chef de l’armée Abdulrahman Dambazau prendrait la tête du ministère de la Défense, chargé de mettre un terme à l’insurrection du groupe islamiste Boko Haram qui sévit depuis six ans dans le nord-est du pays.
Lai Mohammed, porte-parole du Congrès progressiste (APC, au pouvoir), pourrait devenir ministre de la Communication.
« Règlement de dette politique »
Depuis son investiture, Muhammadu Buhari dirige le pays accompagné de hauts fonctionnaires secrétaires permanents, laissant la porte ouverte aux accusations d’autocratie.
Mais l’ancien général de 72 ans, qui a dirigé le pays dans les années 80 à la suite d’un coup d’Etat militaire, se défend: les notes de passation de fonctions ont été reçues trop tardivement pour effectuer les nominations en temps voulu.
Pour le commentateur politique Chris Ngwodo, outre les « allers retours politiques » sur les possibles nominations, le chef de l’Etat a tenté une refonte des administrations gouvernementales, inefficaces.
« Il voulait finir tout ça. Il voulait être capable de mener un audit de la bureaucratie fédérale avant d’avoir des ministres », a indiqué M. Ngwodo.
Pour ce qui est des candidats, M. Buhari est obligé par la Constitution de nommer des candidats provenant des chacun des 36 Etats du pays.
« La liste contient beaucoup d’éléments louables et beaucoup qui donnent matière à réflexion », considère l’historien Max Siollun. « Il s’agit d’une liste pragmatique qui combine le talent technocratique au besoin d’un équilibre ethno-régional prudent ».
Qui plus est, M. Buhari ne pouvaient pas nommer que des « réformateurs d’avant-garde », analyse l’auteur de « Pétrole, politique et violence: la culture du coup d’Etat militaire au Nigeria (1966-1976) ».
« Il a dû prendre les intérêts personnels de certains en compte et inclure des ministres qui n’auraient pas été son premier choix, mais qui sont alliés à des politiciens qui l’ont aidé à se faire élire », estime Max Siollun.
L’éventuelle nomination de personnalités comme l’ancien gouverneur de l’Etat de Lagos Babatunde Fashola et son homologue de l’Etat pétrolier de Rivers Rotimi Amaechi, constituent ainsi un « règlement de dette politique », analyse M. Ngwodo.
Avant son élection, M. Buhari le jurait: « La corruption n’aura plus sa place et les corrompus ne seront pas nommés dans mon gouvernement ».
Il a déjà commencé à purger la NNPC, en nommant M. Kachikwu à sa tête et en ordonnant un audit de ses pratiques financières opaques afin de récupérer les fonds détournés.
Dans le même temps, l’ex-ministre nigériane du Pétrole, Diezani Alison-Madueke a été arrêtée à Londres dans le cadre d’une enquête britannique sur des soupçons de corruption et de blanchiment d’argent, et son domicile d’Abuja mis sous scellés par la Commission des crimes économiques et financiers du Nigeria.
AFP