Depuis l’indépendance de la Guinée jusqu’à nos jours, le débat politique reste axé sur l’ethnocentrisme politique qui paradoxalement en lieu et place d’être une grande richesse se retourne malheureusement contre la Guinée et les guinéens au point de constituer aujourd’hui l’un des obstacles majeurs de son développement et par conséquent d’empêcher la sauvegarde des acquis démocratiques.

En effet cela est dû au fait que les acteurs politiques guinéens dans leur entièreté procède à la substitution de l’intérêt communautaire à l’intérêt national; au favoritisme, népotisme, clientélisme, accentuation des inégalités sociales etc…
Et pourtant aucune démocratie ne peut fonctionner dans une société éthniciste, aucune vision d’ensemble des choses, aucune politique ne peut être entreprise, avec succès dans un tel contexte.

L’autre facteur qui favorise l’ethnocentrisme politique c’est le refus des acteurs politiques d’institutionnaliser le pouvoir politique. Le mythe du chef a eu en Guinée depuis le régime de Sékou Toure des conséquences très négatives, de donner au pouvoir politique un caractère patrimonial. Ceux qui gouvernent se comportent comme si le pouvoir était leur propriété personnelle, un élément de leur patrimoine qu’ils pourraient transmettre à leurs héritiers. Et ces comportement commence d’abord au sein de leur parti politique respectifs et se poursuivent une fois au pouvoir. Un fait inadmissible dans une société qui se veut démocratique. Et c’est pour ne l’avoir pas compris que certaines constitutions étaient du taillées sur mesure dans ce pays, en faveur d’un chef inamovible, et que le tripatouillage de la constitution actuelle est envisagé en vue d’assurer la pérennité d’un régime, et ainsi l’alternance au pouvoir sera rendue pratiquement impossible.

Le deuxième facteur favorisant cette situation est dû à la vaste plaisanterie démocratique orchestrée par la classe politique guinéenne, avec comme tendance majeure la prolifération des partis politiques inutiles.
En Guinée les hommes politiques et les partis politiques poussent comme des champignons, chacun veut faire de la politique, même s’ils n’ont ni la capacité, ni les compétences, ni les valeurs et vertus morales pour occuper les services publics, ils s’y engagent quand même, puisque L’état guinéen est le seul endroit où l’on peut devenir riche sans fournir des efforts.

Le phénomène est souvent couplé avec celui d’un réel vagabondage politique dont les coupables se retrouvent acteurs au sein de plusieurs partis politiques qu’ils créent suite à des désaccords avec leurs anciens collaborateurs. Ce qui m’emmène souvent à dire d’ailleurs que mouvance et opposition sont deux faces de la même médaille. Et ce fait prouve que le système multipartite facilitant la création de ces partis politiques est mal ficelé en Guinée et favorise immanquablement la discorde sociale dans ce pays avec la naissance de nombre élevé de partis politiques et des candidats qui semblent confondre les élections présidentielles aux élections de quartiers de Conakry.

Une telle situation exhorte assurément une politique qui ne se fait que dans le contexte régionaliste, ethnocentrique et clientélisme et encourage la comédie démocratique et la polarisation des divisions ethniques.

En effet les partis politiques en lieu et place d’être des organisations véhiculant, des idéologies, où on parle de projets de sociétés, de projets de développement de la société guinéenne, un endroit où l’on parle de l’édification d’une société démocratique, caractérisée par une culture politique élevée qui demeure un travail quotidien et incessant; sont passés plutôt maîtres dans l’organisation de véritables calembours déguisés en alliances politiques. Celles-ci se font et se défont au gré des enjeux électoraux, juste avant leur précipitation mécanique dans une dislocation plus ou moins parfaite. Et les grands partis de l’opposition sont victimes constantes des manipulations du pouvoir visant la scission au sein de leur formation politique.

C’est la raison pour laquelle, pour lutter contre ces phénomènes de blocage de la consolidation de la démocratie; notamment l’ethnocentrisme politique, la comédie démocratique, il est impératif d’institutionnaliser le pouvoir politique et les partis politiques d’abord, afin d’amener les dirigeants à se conformer aux textes préétablis, et ne pas être tenté de les modifier à leurs ambitions politiques personnelles, enfin les amener à reconnaître qu’ils ne sont que des représentants de la nation et non les propriétaires de la souveraineté. Et pour éradiquer l’instrumentalisation des questions ethniques pour accéder au pouvoir, il faudrait mettre impérativement en place des systèmes qui reconnecteront les partis politiques avec leur mission primaire ; celle de constituer des vecteurs d’idéologies axées sur la résolution de problèmes de développement dans un monde bloqué par la complexité d’idéaux socio-politiques et économiques.

Aissatou Chérif Balde

La politique autrement dans l’unité des Guinéens dans la prospérité.