L’actuel président ivoirien a annoncé ce jeudi 6 août sa candidature à un troisième mandat lors de l’élection du mois d’octobre prochain. Il avait d’abord dit qu’il ne se représenterait pas, laissant son dauphin Amadou Gon Coulibaly porter les couleurs du parti au pouvoir RHDP. Mais la mort de ce dernier a changé la donne.
Avec notre envoyé spécial à Abidjan, Sébastien Németh
« Je suis candidat à l’élection présidentielle du 31 octobre », a annoncé Alassane Ouattara dans son discours à la nation, à la veille de l’anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Le chef de l’Etat a donné deux raisons principales à sa candidature : un cas de force majeure, après la mort du candidat de son parti, Amadou Gon Coulibaly, début juillet, et un devoir citoyen.
Comme pour anticiper les critiques de l’opposition, Alassane Ouattara a rappelé qu’il s’était engagé à ne pas briguer un nouveau mandat dans son discours du 5 mars. Devant le Parlement, il avait dit souhaiter céder la place à une nouvelle génération. Tout en précisant bien que la nouvelle Constitution l’autorisait à se présenter.
Cette décision va rassurer les Ivoiriens et les investisseurs
Hamed Bakayoko, Premier ministre ivoirien
« L’homme propose, Dieu dispose »
« J’avais commencé à organiser mon départ. Ma vie après la présidence. J’avais commencé à relancer l’activité de mon institut et la création d’une fondation », a-t-il expliqué à la nation jeudi soir. Mais « l’homme propose, Dieu dispose », a déclaré Alassane Ouattara en évoquant le décès d’Amadou Gon Coulibaly, ajoutant que cette disparition avait « laissé un vide dans l’équipe mise en place pour poursuivre » son programme.
Le chef de l’Etat ivoirien a ensuite listé les points qui, selon lui, nécessiteraient une continuité à la tête du pays : les défis pour maintenir la paix et la sécurité en Côte d’Ivoire, le besoin de juguler la pandémie de coronavirus, les risques que tous les acquis de ses neuf ans de pouvoir soient compromis. Des points auxquels s’ajoute le calendrier très serré, avec des élections dans trois mois. Alassane Ouattara a donc voulu montrer qu’il se lançait non pas pour s’éterniser au pouvoir, mais plutôt par la force des choses.
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L’opposition évoque une violation de la Constitution
Quelques minutes après l’annonce d’Alassane Ouattara, les membres de l’opposition politique ivoirienne n’ont pas tardé à réagir à cette candidature. Pour Issiaka Sangaré, secrétaire général et porte-parole du FPI de Pascal Affi Nguessan, cette candidature est « en contradiction flagrante avec la loi fondamentale ivoirienne ». Il estime qu’elle constitue un message négatif à plusieurs niveaux.
Ce message n’est pas bon au niveau international parce qu’il laisse l’Afrique dans des atermoiements
Issiaka Sangaré
L’opposition brandit la question de la légalité d’un troisième mandat. En effet, l’article 183 de la Constitution de 2016 interdirait, selon eux, toute candidature du président ivoirien.
Il viole la constitution de la Côte d’Ivoire
Moussa Touré, directeur de la communication de Guillaume Soro
Un débat juridique qui pourrait se terminer devant le Conseil constitutionnel, dont plus de la moitié des juges ont été nommés par ADO.
Autre angle d’attaque que pourrait utiliser l’opposition: le chef de l’Etat n’est pas un homme de parole, car le 5 mars, devant le Parlement, il avait promis qu’il partirait en octobre. Là encore, le chef de l’Etat y a fait allusion. Parlant d’un cas de force majeure, de devoir citoyen et listant une série de points justifiant une continuité à la tête de l’Etat…
Le fait qu’il voulait se laisser le temps du deuil avant de prendre sa décision pourrait éventuellement être utilisé. Il aurait dû attendre 40 jours après la mort d’Amadou Gon Coulibaly avant d’annoncer sa décision. « Compte tenu de l’importance que j’accorde à mes engagements, cette candidature représente un vrai sacrifice pour moi », a déclaré jeudi soir Alassane Ouattara, qui là encore essaie d’anticiper les critiques de ses adversaires.