Au terme de son périple chinois, le Président de la République s’est prêté aux questions de la Cellule de communication du gouvernement (CCG). Entretien-bilan dont Alpha Condé a profité pour aborder cependant plusieurs sujets au-delà de son déplacement. Ainsi, il a évoqué les implications de la conclusion du programme formel avec le FMI et la semaine de la Citoyenneté ainsi que la COP22 qui débute très prochainement au Maroc. Mais comme il fallait s’y attendre, la coopération guinéo-chinoise a occupé l’essentiel de l’entretien. Et à l’occasion, on découvre un Président de la République qui mise beaucoup sur le géant asiatique et par rapport à l’ensemble des enjeux de développement socioéconomique de la Guinée.
Cellule de communication du gouvernement : M. le Président, vous avez annoncé la conclusion de la 8ème et dernière revue avec la Guinée, une première dans notre pays. Que d’efforts fournis pour obtenir ce résultat ?
Alpha Condé : C’est une grande satisfaction. C’est une reconnaissance pour le peuple de Guinée. Parce que si on a pu réussir ce que la Guinée n’a jamais réussi, c’est grâce au sacrifice accepté par le peuple de Guinée. Parce que nous savons que les conditions imposées par le plan formel lié à l’annulation de la dette sont très contraignantes. Ça nous a donc obligé à serrer la ceinture. Mais Dieu merci, grâce au courage et à l’abnégation du peuple de Guinée, à l’accompagnement du syndicat et surtout au bon travail du gouvernement, nous avons réussi aujourd’hui à clôturer le programme. C’est une grande satisfaction.
- le Président, quelles pourraient être les implications de la fin de ce programme ?
D’abord, nous allons discuter avec le Fonds monétaire international (FMI) d’un nouveau programme de coopération. Parce qu’il est toujours important d’avoir un programme avec le Fonds monétaire. Mais ça se passera dans d’autres conditions parce que ce ne sera plus un accord lié à l’annulation de la dette. Donc, nous sommes en train de faire notre plan quinquennal 2016-2020. C’est en fonction de ce plan que nous allons discuter de nouveau avec le Fonds monétaire pour avoir un autre programme.
Parlons maintenant de votre visite en Chine. Tour à tour, vous vous êtes rendu à Xi’an, Pékin et Chengdu, où vous avez rencontré plusieurs investisseurs et les plus hautes autorités administratives du pays. Comment expliquez-vous cette chaleur et cette ferveur du peuple chinois depuis votre arrivée et surtout que retenir de cette visite d’Etat de façon générale ?
Vous savez, l’amitié entre la Chine et la Guinée remonte à longtemps. Nous avons été le premier pays de l’Afrique au sud du Sahara à reconnaître la Chine. Notre voyage nous a permis de renforcer la coopération et surtout d’établir un partenariat stratégique à long terme pour 40 voire 50 ans. Nous sommes très riches en matières premières. Vous savez que nous avons les minerais de fer les plus riches au monde. Malheureusement, Rio Tinto a gelé notre mine pour mettre en valeur leur mine. Aujourd’hui, grâce à la coopération avec les Chinois, nous avons l’espoir que Simandou va démarrer. Dans l’accord stratégique, la Chine a les moyens financiers et la technologie. La chine va nous accompagner pour les infrastructures routières. Aujourd’hui, vous savez comment les routes de la Guinée sont dégradées, que ce soit à Conakry ou les routes Coyah-Dabola, Kankan-Mandiana, Beyla-Kankan, Mamou-Labé, Boké-Gaoual, etc. Sans compter les échangeurs. Donc, dans l’accord stratégique, la Chine va nous accompagner pour les infrastructures routières mais aussi ferroviaires avec notamment les chemins de fer Conakry-Kankan-Bamako, sur le port autonome de Conakry, la zone industrielle que nous allons faire dans la région de Boké-Boffa, mais aussi dans le domaine de l’énergie. Après le barrage de Souapiti, nous allons faire le barrage de Koukoutamba ainsi que l’énergie solaire. La Chine va nous accompagner aussi dans l’agriculture en fournissant des semences améliorées et en nous accompagnant pour l’aménagement. Vous savez qu’aujourd’hui, on produit une fois par an. Mais avec l’aménagement, on va produire trois fois par an et la Guinée va devenir le grenier de l’Afrique de l’ouest, comme cela était prévu pendant la période coloniale. Donc, je suis satisfait de ma visite. Et surtout, le président chinois a témoigné beaucoup de considération à la Guinée. D’ailleurs, son père était venu en Guinée en 1984, à l’enterrement du président Sékou Touré.
Malgré votre emploi du temps chargé depuis votre arrivée en Chine, on vous a vu suivre de près l’évolution de l’actualité en Guinée, notamment le lancement de la semaine nationale de la citoyenneté. Pourquoi avoir décrété cette semaine ?
Vous savez, en Guinée, notre passé est très lourd. Nous avons besoin de nous réconcilier. Avec l’opposition, nous nous sommes mis d’accord pour que la gestion du pays et les rapports politiques soient civilisés. Il est important aussi qu’on développe l’esprit civique. Parce que nous n’enseignons pas le civisme, il est important que l’esprit civique se développe pour qu’il y ait moins d’anarchie dans le pays et que les gens respectent la loi. Et que surtout les Guinéens se reconnaissent entre eux et qu’ils se donnent la main. Donc, cette semaine est extrêmement utile pour cela et nous félicitons le ministre Khalifa Gassama Diaby pour avoir pris cette initiative et il faut que le gouvernement l’accompagne totalement. Mais avant ça, il y avait la fête de l’armée. J’ai adressé un message de félicitation à l’armée. Parce que l’armée guinéenne a beaucoup changé. Non seulement elle est devenue une armée républicaine qui, aujourd’hui, intervient dans le cadre des Nations unies, au Mali, mais aussi l’armée participe aujourd’hui à l’activité économique que ce soit à travers l’agriculture ou dans le domaine des bâtiments. Nous savons aussi comment le génie militaire s’investit dans l’assainissement de Conakry. Avec la fin du PPTE et le renforcement des relations avec la Chine et la Russie, nous allons moderniser davantage l’armée et faire en sorte qu’elle soit une des meilleures armées de l’Afrique.
L’actualité, c’est aussi la COP22 qui va se tenir dans quelques jours au Maroc (Marrakech). En tant que coordonnateur du plan d’électrification de l’Afrique, quel sera votre message à cette occasion ?
D’abord, lors de la COP22, nous allons publier la déclaration UA-UE pour l’énergie en Afrique. Vous savez qu’à l’issue de la COP21, l’Union européenne s’est engagée à fournir 5 gigawatts. Donc, nous allons signer cet accord et démarrer l’analyse des projets qui peuvent être financés. Ça c’est l’acte le plus important pour nous. Parce que sur un milliard d’habitants en Afrique, 700 millions n’ont pas accès à l’énergie. Ensuite, bien évidemment sous le leadership du roi du Maroc et du gouvernement marocain, nous allons davantage renforcer les acquis de la COP21, concernant notamment le climat.
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