Le lynchage public prend de plus en plus de l’ampleur à Conakry et dans certaines villes de l’intérieur su pays. Accusé à tort ou à raison, certains citoyens ont eu la malchance de se faire lyncher par cette justice, qui n’est outre que la colère populaire contre le système judicaire du pays.
En Guinée comme dans plusieurs pays africains, la justice populaire est devenue monnaie courante. Les citoyens préfèrent désormais finir avec leur coupable parfois jusqu’à les tuer plutôt que se remettre à la force de la justice de du pays. Une espèce de procès qui se déroule dans la rue sous le regard parfois impuissant des autorités.
La vindicte populaire reste un phénomène social qui est beaucoup plus pratiquée en Guinée. Elle est la justice que la population se rend elle- même. Selon SekouManjouNabé, sociologue et enseignant chercheur, cette pratique résulte d’une crise de confiance entre citoyens et autorités. « Lorsque nous tenons compte des vertus de la démocratie, il est clair que ce n’est pas à la population de se rendre justice. Par ce que lorsque les populations se rendent juste, c’est facile qu’il ait des erreurs. A partir des simples rumeurs, les populations peuvent tenter de se rendre justice et commettre le pire ».
Pour parer à cette situation, SekouManjouNabé pense qu’il revient aux forces de sécurité de partir vers les populations pour connaitre leurs problèmes. Car la mission principale des forces de sécurité est d’assurer la protection des citoyens et leurs biens. Ce qui nécessite selon lui, la construction de bons rapports entre populations et forces de sécurité. « Les forces de justice doivent éviter trop de lenteurs dans le traitement des dossiers », soutien-t-il.
Mais d’un autre côté, il faut reconnaitre que les forces de sécurité manquent de mesures en amont pouvant leur permettre d’accomplir leur fonction. Il s’agit notamment du ratio faible du nombre d’habitants par policier. Selon le chef de cabinet du ministère de la sécurité, Nouhan Traoré Ce ratio est aujourd’hui à 2500 habitants pour un policier. « Par rapport à la moyenne, il faudrait qu’on ait un policier pour 1000 personnes. Il y a aussi le manque de formation. Depuis 15 ans durant, la police nationale n’a jamais connu de formation.Enfin, il y‘a l’handicape liée à logistique », explique le chef de cabinet du département en charge de la sécurité.
Depuis un certain temps le gouvernement se déploie à la formation des agents de la force de l’ordre et de sécurité, mais à l’amélioration de son système judicaire. En dépit de ces avancées, la crise de confiance et entre citoyens système judiciaire reste toujours de mise.« Depuis novembre 2016, le ministère de la Sécurité a ouvert deux centres de Kagbélèn et Kabiya pour une formation progressive de 1700 agents et officiers. La première promotion est sortie en avril passé. 304 agents ont suivi des formations communes de base », a indiqué Nouhan Traoré.
Pour restaurer ce climat de confiance, il a annoncé un certain nombre de dispositions prises par le gouvernement à travers son département, notamment le déploiement de nouveaux agents. « Par rapport aux besoins d’effectifs, il nous a été accordé aussi la possibilité de recrutement de 631agents et officiers. Les dossiers sont là et bientôt, nous allons entamer le processus de recrutement.Sur la question de ratio, nous comptons déployer les services de sécurité, des agents et officiers dans l’ensemble du pays. Je signale que chaque département est appelé à identifier son besoin de déploiement du personnel. Nous allons procéder à une mutation totale pour une couverture sécuritaire totale », a-t-il révélé.
A chacun son rôle…
L’insécurité est phénomène qui nécessite une bonne collaboration entre citoyens, forces de l’ordre et système judiciaire. Les populations ont besoin de se sentir en sécurité et avoir confiance en leur justice. Mais pour résoudre ce phénomène de justice populaire, chacune des parties doit jouer sa partition. La loi doit être appliquée pour tous et contre tous. Le respect présomption d’innocence ainsi que la promptitude dans le traitement des dossiers doivent être un cheval de bataille pour le département en charge de la justice. Tout comme la protection des citoyens contre les malfaiteurs.
D’un autre côté, le département en charge de la citoyenneté ainsi que les organisations qui œuvrentdans le domaine de la défense des droits de l’homme doivent aussi s’impliquer dans l’information et la sensibilisation des populations contre les méfaits de la justice populaire. Avec une population majoritairement analphabète, et qui, de surcroit, manque de confiance en son appareil judiciaire, il faut de nouvelles approches plus participatives et coordonnées. Si la justice populaire est une manière directe et radicale de se faire justice, elle ne met pas pourtant fin à l’insécurité. Elle créé une situation de confusion et de méfiance. Elle installe la psychose d’être en insécurité permanant.
Alpha Diallo