Au Mali, l’imam Mahmoud Dicko, figure emblématique de l’opposition au président Ibrahim Boubacar Keïta, voit sa stature renforcée par la crise actuelle.

Il avait le visage fermé. Vêtu comme à son habitude d’un boubou clair, il a lancé : « Rien n’a bougé pour le moment. » Jeudi, l’imam Mahmoud Dicko venait de sortir d’un entretien avec les cinq chefs d’Etat d’Afrique de l’Ouest venus à Bamako pour appuyer les efforts de la médiation de la Cedeao. A la tête d’une coalition hétéroclite qui mène le plus important mouvement de contestation anti-pouvoir qu’ait connu le Mali depuis le coup d’Etat de 2012, Dicko a ajouté : « Nous sommes un peuple debout, nous ne sommes pas un peuple soumis ou résigné. »

Ancien soutien d’IBK, il est devenu sa bête noire

Ce jour-là, les présidents africains n’ont pas réussi à faire accepter leur plan de sortie de crise – qui ne prévoit pas le départ du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), pourtant exigé par l’opposition. Un sommet extraordinaire de la Cedeao doit se tenir lundi par visioconférence pour poursuivre la médiation.

A 66 ans, l’imam Dicko est l’une des voix les plus influentes du pays. Né à Tombouctou dans une famille de notables, il a étudié dans des écoles coraniques en Arabie saoudite avant de revenir à Bamako dans les ­années 1980. Après avoir soutenu l’ancien dictateur Moussa Traoré puis contribué à l’élection d’IBK, Dicko est devenu la bête noire de ce dernier. Homme de l’ombre, il flirte avec la politique, se gardant bien de vouloir assumer des responsabilités. Mais ce religieux aux prêches patriotes et rigoristes profite du climat d’exaspération au sein de la population concernant la corruption du pouvoir et le marasme économique.