Depuis ce dimanche 5 septembre 2021, Conakry vit au rythme des scènes de liesse suite à un coup d’État qui a fini par mettre un terme au mandat de trop qu’Alpha Condé s’est offert il y a dix mois.
Or, avant d’opter pour ce projet « suicidaire », l’opposant historique devenu président de la République avait bien été conseillé sur les conséquences fâcheuses qui pourraient éventuellement découler de cette demarche solitaire. Hélas, l’homme est resté droit dans sa nouvelle dynamique.
Fil des événements
A la faveur de la prestation de serment d’Alpha Condé au compte de son second mandat, le défunt président de la Cour constitutionnelle, Kéléfa Diallo, en présence de nombreux chefs d’état et de gouvernements mobilisés pour la circonstance, conseillait le président réélu en ces termes :
« Évitez toujours les dérapages vers les chemins interdits en démocratie et en bonne gouvernance. Gardez-vous de succomber à la mélodie des sirènes révisionnistes. Car, si le peuple de Guinée vous a donné et renouvelé sa confiance, il demeure cependant légitimement vigilant« .
Un message simple et accessible à l’oreille la plus sourde. Hélas, le moment venu, celui à qui il était adressé dira qu’il revient au peuple « démocrate et souverain » de Guinée de décider de son sort. La batterie sera donc rechargée et le véhicule mis en marche vers le projet de troisième mandat.
Démission en cascade dans le gouvernement
Engagé à tout prix à tripatouiller la Constitution en vue de s’offrir un mandat d’excès, Alpha Condé est lâché par ses proches collaborateurs. C’est son ministre de l’Unité nationale et de la Citoyenneté d’alors, Khalifa Gassama Diaby, qui ouvre le bal de cette série de démissions, un certain 14 novembre 2018.
« Lorsqu’on a définitivement acquis la certitude que le combat que l’on mène avec le cœur, l’honnêteté et l’engagement éthique n’est plus manifestement, clairement, une préoccupation et une priorité majeure ni pour le gouvernement auquel on appartient, ni pour les acteurs politiques nationaux, ni dans le jeu politique et institutionnel, on se retire« .
C’était, entre autres, par ces mots que Khalifa Gassama Diaby justifiait sa décision de rendre le tablier. Toute chose qui n’ébranlera point Alpha Condé. D’ailleurs, il ne mettra pas assez de temps avant de nommer le ministre Mamadou Taran Diallo comme remplaçant du démissionnaire, sans se soucier de tirer la leçon de cet acte de M. Diaby.
Quelque six mois après, c’est autour du ministre de la Justice, en poste depuis 2014, de claquer la porte au gouvernement. C’était précisément le 20 mai 2019. Dans son courrier adressé à Alpha Condé, il motive sa démission du gouvernement par des faits qu’il a étayés, et dont voici un pan :
« Tirant les conséquences de votre silence depuis le 4 avril 2019, jour de notre entretien et de la remise du courrier vous demandant de me remplacer dans mes fonctions de ministre de la Justice, Garde des Sceaux, je vous présente ma démission du gouvernement« , lisait-on dans le courrier que Me Cheick Sako avait alors adressé au désormais ancien président Alpha Condé.
Chemin faisant, une troisième démission est intervenue au sein du gouvernement. Alors que certains jouent aux troubadours auprès d’Alpha Condé, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Yéro Baldé, renonce à tous les privilèges en démissionnant du gouvernement de Kassory Fofana, le 27 février 2020.
Ce compagnon de lutte d’Alpha Condé depuis plus de trente ans a, quant à lui, estimé que l’idéal pour lequel ils ont mené trois décennies de combat politique est en train d’être galvaudé au regard de la crise aiguë qui secoue le pays relative à la nouvelle constitution qui permettra à Alpha Condé de faire un mandat de plus.
En voici autant de messages et de décisions qui devraient éveiller au président déchu le sens élevé de discernement en mesurant tous les risques qui pourraient advenir de son projet qui le fixe sur ce sort qu’il n’avait certes jamais prévu.