Le président Alpha Condé disait, à juste titre, avoir hérité d’un pays, pas d’un Etat. Aussi, pourrait-on affirmer que la 3e République a hérité d’une école mais pas d’un système éducatif. L’un dans l’autre, tout pourrait s’expliquer à la lumière d’une analyse critique sur l’Ecole guinéenne, dans le long processus de son évolution, de la 1ere République à la 3eme.
Sous la première République : Les exigences du moment, dès la rupture avec le régime colonial français, avaient nécessité, du fait de la précarité de l’Ecole guinéenne (insuffisance d’enseignants qualifiés, manque d’équipements appropriés, baisse du taux de scolarité, manque de formation), la mise en place d’un vaste programme d’alphabétisation fonctionnelle dont l’objectif était de faire de cette école, le réceptacle de la future société préconisée. C’est ainsi qu’elle sera ouverte, cette Ecole, à un plus grand nombre d’auditeurs. La recherche de l’élite n’ayant pas été une priorité du moment, l’expérimentation d’un système éducatif fondé sur ‘’un Enseignement de masse et de qualité’’ ne pouvait que générer d’autres difficultés. Des erreurs, certes, qui permettent de comprendre, aujourd’hui, toutes les dérives que devait connaître l’Ecole guinéenne du temps de la révolution. L’option politique axée sur la prédominance des mouvements de masse sur les initiatives privées, avait fini par dégrader l’enseignement de base en Guinée, malgré le flux de professeurs qualifiés venus offrir leurs bons offices au niveau supérieur. L’introduction des langues vernaculaires, au détriment du français considéré comme l’arme la plus pernicieuse de la colonisation, avait contribué à la disqualification du système éducatif. De nombreux élèves en feront les victimes expiatoires. Un enseignement de masse ne pouvait jamais être de qualité, même si le responsable suprême de la Révolution avait cru être un prodigieux harangueur des foule et un champion en reformes sociales. L’échec de son système politique est patent du côté de l’Education. La rupture avec le système éducatif français aura été, il faut l’avouer, une erreur fatale pour l’école guinéenne. Le français parlé avait pris le dessus sur le français écrit. C’est ainsi que des produits de ce système sont devenus de ‘’beaux parleurs’’ mais de véritables piètres en français écrit, du fait des lacunes accumulées au niveau de l’enseignement de base où les langues du terroir, non structurées, avait presque supplanté l’étude syntaxique du français considéré comme une langue de domination. C’était l’école du pur psittacisme. Pour mettre son génie au service de son peuple, le responsable suprême de la révolution, s’était exercé à produire de nombreux ouvrages, en langue française, sur les grandes théories de sa vision politique. Des références qui mettent en évidence les limites du président Sékou Touré dans la perception qu’il avait de certaines notions philosophiques, parfois mal comprises. Faudrait-il prendre tout ceci en compte dans le mauvais choix du système éducatif de la Révolution ? La vision politique de Sékou Touré n’est qu’une dimension limitée de l’envergure de sa personnalité. Tout, de son temps, obéissait à la volonté de relever des défis réels et imaginaires. Il avait ainsi cru devoir tout rejeter de la colonisation, perçue, ailleurs, comme un mal nécessaire. Mais devrait-on rejeter le système éducatif français, en cours avant l’indépendance du pays ? C’était un défi périlleux, parce que, si les langues nationales avaient pu réussir, l’on aurait renoncé à enseigner le français dans nos écoles. Ce qui aurait fait de la Guinée une exclusivité, comme elle l’avait été dans bien d’autres domaines. Sékou Touré avait une surestimation de la volonté populaire et une dimension assez réduite du néocolonialisme qu’il avait pourtant prédit et dénoncé et qui semble avoir réussi, aujourd’hui, la récupération des anciennes possessions de la vieille Métropole. L’Afrique francophone peut quitter la France, mais pas la langue française, la langue d’une Minorité, du Savoir et du Pouvoir. Tout était à faire dans l’Education, à la mort de Sékou Touré. Mais y a-t-on réussi ? En tout cas, le président Alpha dit avoir pris la Guinée, là où Sékou Touré l’a laissée. Ce qui est riche en enseignements.
Sous la deuxième République : Les erreurs du passé ont été relativement identifiées, avec l’ouverture de la Guinée sur le monde extérieur. Le pays a été envahi par de nombreux cadres ayant exercé à l’Etranger, certains dans des écoles de référence. Cependant, le personnel pédago- administratif qui avait la charge d’apporter des réformes au système éducatif, pour l’adapter et le rendre plus performant, n’avait pas été recyclé. Les anciens réflexes avaient fait que le même moule continuait de produire les mêmes modèles. Les créations d’écoles ne répondaient ni aux normes requises ni aux exigences de compétence demandée. Le mal était moins de voir une floraison d’écoles, que de se retrouver avec un personnel enseignant mal formé et manquant de qualification, en termes de maîtrise du métier. Le niveau de nos écoles reflétait celui du corps enseignant. Même si l’apport inestimable de l’élite de Dabadou constituait un tout dernier espoir, avec les tout derniers enseignants dont la plupart étaient déjà aux portes de la retraite..Le pays se retrouva, en définitive, avec un nombre important de chômeurs diplômés. L’inadéquation entre le profil et l’emploi en est la raison principale. Il y a aussi que ceux qui avaient un premier emploi n’avaient pas le niveau requis. Les examens étaient de simples formalités. Les réussites étaient moins surprenantes que la façon de réussir. La moralité des examens était foulée au sol. Sous la deuxième, il y a eu, malgré des efforts fournis, une mauvaise politique de l’Education, notamment, dans les conditions d’ouverture des écoles, où le laxisme avait eu raison du respect des principes. De nombreux établissements scolaires continuaient de polluer le climat de l’Education. Parfois ce sont des baraques, des locaux inappropriés, des vérandas de maisons qui servaient de salles de classe. Conakry est l’une des rares capitales africaines qui comptent plus d’une cinquantaine d’universités dont les 90% ne répondent pas aux normes. Les professeurs, pour la plupart, n’étant que des sortants des mêmes universités, reformés, pour répondre aux demandes expresses des fondateurs d’établissements, eux-mêmes propriétaires d’entreprises scolaires en quête de gain. « Ne peut enseigner à l’Université qui le veut ». Le système éducatif, sous le régime défunt, avait certes posé des actes louables, notamment dans la vulgarisation de l’enseignement public et privé, même si l’anarchie a prévalu dans les prises de décisions, en défaveur de la culture de l’excellence.
Sous la 3e République : L’héritage est lourd, tant les défis à relever sont nombreux. C’est dans ce contexte que naîtra la 3e République, avec l’arrivée au pouvoir du président Alpha Condé en 2010. Professeur, donc enseignant de profession, le président Alpha Condé ne pouvait que faire de la qualification du système éducatif guinéen l’une de ses principales priorités. Sa vision pour l’Ecole guinéenne, il l’a annoncée et définie, à travers une vision plus large et conforme à l’évolution de l’enseignement dans le Monde. C’est ainsi que, prenant en compte les dérives du passé, les tares et autres maladresses qui avaient énormément nui à l’école guinéenne, le Pr Alpha Condé nommaDr Ibrahima Kourouma à la tête de l’Enseignement pré-universitaire qui regroupe l’Enseignement de base (le primaire), l’Enseignement secondaire (le lycée) et l’Alphabétisation fonctionnelles (l’Informel). Pour la gestion d’une telle charge, le département s’est doté de nombreux services, services rattachés et autres organes dont les missions sont spécifiques dans le cadre d’une politique d’enseignement bien élaboré et conforme à la vision du Chef de l’Etat, le Pr Alpha Condé. Fondé sur un système de décentralisation couvrant l’ensemble du territoire, l’administration en charge de l’enseignement pré-universitaire cerne tous les problèmes de l’école guinéenne et y apporte des solutions immédiates. Au titre de la formation des enseignants, des réformes et autres innovations mises en œuvre par Dr Kourouma, il faut noter la formation et l’encadrement, dans le cadre de l’amélioration des capacités, de 35219 enseignants ayant bénéficié de formation continue. Une politique de gestion participative a été mise en œuvre, avec l’implication des partenaires sociaux de l’Ecole (syndicats et parents d’élèves) dans les prises de décisions. L’orientation de qualité des services déconcentrés dans l’accomplissement de leur mission, la facilité de la circulation de l’information entre structures centrales et déconcentrées, l’installation d’une base des données, sont, entre autres, des innovations qui s’inscrivent dans la gestion harmonieuse et active des ressources humaines. C’est sous la 3e république, qu’il a été construit 5098 salles de classes dans le pays, en cinq ans, soit une moyenne de 1000 salles de classe par an. Pour la première fois, il a été construit, en Guinée, un bâtiment flambant neuf doté de nombreux bureaux équipés, pour l’Enseignement pré-universitaire et de l’Alphabétisation.
A cela, il faut ajouter la politique de moralisation des examens, visant à responsabiliser le corps enseignant, à instaurer la culture du mérite et, Surtout, à relever le niveau dans nos écoles où le favoritisme et le laxisme avaient eu droit de cité, dans un passé récent. Les résolutions issues du premier Salon de l’Education aura permis de réussir d’importantes réformes et innovations pédagogiques dont les résultats se passent, aujourd’hui, de commentaires. Des actions positives à saluer.
Au titre de 2015 : Il a été engagé la construction, la réhabilitation et l’équipement des infrastructures scolaires. La mise en œuvre du suivi de proximité consistant à intensifier les inspections pédagogiques.
La finalisation des études de construction des lycées d’excellence, dans le but de créer de l’émulation au sein de nos écoles. Une adaptation et une diversification des filières au secondaire, afin qu’il réponde aux besoins exprimés. Une réforme de l’enseignement franco-arabe, pour la rendre plus académique. Le soutien à la formation continue des enseignants et encadreurs. Il est prévu une extension des cantines scolaires. Le Lancement de la Radio scolaire et la redynamisation des organes consultatifs du département. Ce sont là, entre autres, des actes posés, à l’actif de Dr Ibrahima Kourouma . Un véritable exploit, quand on sait que sa nomination à la tête du pré-universitaire aura permis de qualifier davantage le système éducatif guinéen resté longtemps à l’agonie, du fait des lacunes et insuffisances accumulées sous les régimes politiques précédents. L’on pourrait affirmer, aujourd’hui, que la vision du chef de l’Etat, le Pr Alpha Condé, pour l’Ecole guinéenne, est en voie de s’accomplir, avec Dr Kourouma à la tête du département le plus stratégique de l’Education. Que la nouvelle année scolaire permette l’accomplissement effectif des reformes et innovations en cours. C’est le souhait partagé de tous les Guinéens.
Thierno Dayedio Barry
(Source Nouvelle Elite N° 151)