« Ces gens m’ont vraiment eu. Et comme moi, ils doivent à beaucoup d’autres personnes.»Ces lamentations sont d’un client du représentant en Guinée du prestigieux groupe sud-coréen Samsung. L’homme a engagé une poursuite judiciaire contre l’entreprise qui doit répondre des faits « d’abus de confiance » et « d’escroquerie » devant le tribunal de première instance de Mafanco, en banlieue de Conakry. L’issue du procès pourrait être connue après la vacance judiciaire (courant septembre). Mais en attendant, la présumée victime, Abdoul Aziz Kaba, témoigne de sa mésaventure avec Samsung-Guinée, branche de SCF (Société de Commerce et de Financement) de l’homme d’affaires Alpha Ahmadou Diallo.
A en croire à Abdoul Aziz Kaba, tout a commencé en décembre 2013 quand il a fait des achats d’articles divers — un poste téléviseur (écran 64), un home cinéma, quatre climatiseurs ( 2 splits et 2 Window ) et un four à micro-ondes — dans le bureau de Samsung à Almamya (Kaloum). Des articles qui lui ont coûté en tout 36 400 000 francs guinéens. Une garantie d’un an a été donnée à Abdoul Aziz Kaba. Il a accepté de se contenter de cela même s’il voulait deux ans de garantie « comme le fait Samsung ailleurs ».
Le contrat de vente se portera tant bien que mal jusqu’en juin 2014, soit le 8ème mois de la garantie rassurée par le responsable par Thierno Oumar Diallo, le directeur général de Samsung-Guinée et fils du PDG de SCF. « Ma famille regardait la télé. Contre toute attente, ma femme est venue m’informer que le poste téléviseur s’est éteint [...] J’ai vérifié, et il s’est trouvé qu’il est tombé en panne. J’ai donc appelé le vendeur. Il m’a demandé de déposer l’appareil à leur direction générale sise à Matam. Ce que ma femme a fait le lendemain. À Matam, ils ont fait rentrer le téléviseur dans une pièce pendant que ma femme attendait dans une salle. À leur sortie, quand je les ai appelés au téléphone, ils m’ont demandé de payer 10 millions pour remplacer l’écran. Je leur ai demandé pourquoi payer 10 millions pour remplacer un appareil qui est sous garantie. Ils m’ont dit : c’est parce que l’écran est cassé. Ce qui n’était pas du tout fondé. Puisque l’écran n’a jamais été cassé…»
La présidence s’implique
Les tiraillements vont se poursuivre entre Thierno Oumar Diallo et son client. Le vendeur se serait cramponné au paiement des 10 millions. Refusant systématiquement toute idée de remplacement de l’écran. « Pour cet écran, monsieur Diallo n’a jamais montré du respect à mon égard », s’est plaint Kaba.
Quelques semaines plus tard, Kaba et Diallo père se rencontreront par hasard dans les couloirs du bureau de Samsung. Les deux hommes échangent sur le conflit. Et le dernier s’engage à satisfaire le premier après une réunion à la laquelle ont pris part son fils de directeur général ainsi que le directeur financier de l’entreprise. Sauf qu’il n’aurait jamais honoré cet engagement. Plutôt, c’est un ministre conseiller à la présidence de la République qui va s’introduire dans le dossier. « Monsieur Fofana m’a dit de venir le voir à la présidence. Comme j’avais insisté pour qu’il me dise pourquoi il m’invitait à Shékoutoureyah, il a fini par me dire que c’est pour régler le problème que j’avais avec Alpha Ahmadou et son fils. Mais c’était tard, je devais me rendre à Dakar », a poursuivi le Kaba.
À Dakar, Kaba profite de son séjour pour porter le problème à la connaissance du bureau sous-régional de Samsung. Ce denier remonte l’information au bureau de Samsung en Corée du sud. En conséquence, Samsung Guinée est prié de remplacer l’appareil de monsieur Kaba. « Quand j’ai fait le retour à Conakry, monsieur Fofana m’a reproché de n’avoir pas respecté ce qu’on s’est dit. Il ne voulait pas que le problème aille jusqu’à ce niveau. Je lui ai tout simplement demandé de se retirer de cette affaire qui n’est pas du tout une affaire d’État », a indiqué Abdoul Aziz Kaba.
L’insatisfaction de Kaba était loin de son terme même avec cette implication du bureau principal de Samsung depuis la Corée. « À chaque fois que j’ai appelé à Dakar, on m’a demandé si Conakry n’ a pas encore remplacé mon appareil. Pendant ce temps, à Conakry, Thierno Oumar refuse de décrocher mes appels ou me raccroche au nez », rapporte Kaba. Exaspéré, Kaba a fini par lâcher la patience. Sur les conseils de ses proches, il a porté plainte devant le tribunal de première instance de Mafanco… « C’est gens ont décidé de négocier pour que l’affaire soit classée sans suite », accuse en outre Abdoul Aziz Camara.
Nous avons cherché à confronter les accusations de monsieur Kaba aux réponses de ses adversaires. Mais nos tentatives sont restées vaines. Alors qu’on cherchait à joindre Diallo fils ou père, nous sommes tombés sur « un simple » employé de Samsung Guinée. Ce dernier nous dirige vers le secrétariat du bureau principal. À Matam, alors qu’on s’attendait à des réponses aux accusations de monsieur Kaba, on nous a plutôt demandé pourquoi on s’intéressait à ce dossier. L’autre question qui nous a été posée au secrétariat c’est : « qui vous a donné mon numéro ? » Et comme ce nom n’a pas été révélé, on ne nous a pas permis d’accéder aux dirigeants de Samsung -Guinée. Et jusqu’au moment où nous mettions cette dépêche en ligne, monsieur Thierno Oumar Diallo n’a décroché aucun de nos nombreux appels téléphoniques.
Notons que ce que le client réclame est infime dans le patrimoine du patron de Samsung en Guinée. Vite que justice soit rendue pour éclairer la religion de l’opinion nationale et internationale.
Sannou Camara